Départ, Waterloo côté anglais. Direction Waterloo, côté belge.
Retour sur un pan d’histoire exceptionnel. De retour de son exil sur l’île d’Elbe, Napoléon tente de reprendre le pouvoir. L’Europe, toutefois s’y oppose. Ne pouvant obtenir la paix avec les nations, il décide de détruire deux armées (prussienne et britannique) stationnées en Belgique (qui à l’époque était rattachée aux Pays-Bas).
Le 15 juin, Napoléon remporte la victoire sur les prussiens.
Le 18 juin 1815 se joue la bataille de Waterloo. S’y affrontent la France et l’Angleterre, Napoléon contre Wellington, 71 000 soldats d’un côté, 67 000 de l’autre. Les Français gagnèrent presque… au dernier moment, 3 corps prussiens, que l’empereur pensait en fuite, s’unit aux régiments britanniques et remportent la victoire. 22 années de guerres entre la Révolution et de l’Empire viennent enfin à terme.
C’est la fin des Cent-Jours, ce court retour de Napoléon sur la scène politique. Il abdique une seconde (et dernière) fois avant de retourner en exil, sur Saint Hélène.
Contre toute attente les premiers touristes… arrivèrent le lendemain de la bataille. Des peintres anglais, qui séjournaient sur Bruxelles, firent le chemin pour fixer la scène dans leur esprit, en saisir toute l’ampleur.
Chaque année, un spectacle remet en scène la célèbre bataille. Un hommage à ces milliers de soldats tués au combat. Les costumes sont au plus près de ceux d’époque, les acteurs principalement des bénévoles. Dans quelques semaines, pour le bicentenaire, l’édition sera plus imposante que jamais – les tickets sont d’ailleurs sold out : 5000 figurants, 300 chevaux et 100 canons. A l’occasion, la région a souhaité mettre en avant cette mémoire du souvenir, un développement conséquent côté musées et accueil des visiteurs. Venez, je vous emmène en coulisses…
>> La bataille de Waterloo 2015
Un coup d’Eurostar et nous voilà à Bruxelles. De là, Waterloo n’est plus qu’à 20 minutes de route. Nous posons nos valises au Martin’s Grand Hotel – chambres contemporaines, confortables. Le clou? Y dîner sous les magnifiques voûtes de briques de l’ancienne raffinerie de sucre, datant de 1836. L’occasion d’y goûter une bière locale, la Waterloo (the beer of bravery!), une cuisine fine préparée entièrement sur place, du foie gras au truffé. Le dessert fut particulièrement théâtral : une pyramide chocolatée, clin d’œil à la fameuse butte du lion! Je tire mon chapeau au chef.
>> Martin’s Grand Hotel, Chaussée de Tervuren 198, Waterloo
Les champs de bataille, toutefois, étaient à Braine-l’Alleud, tout proche. Le Duc avait établi ses quartiers à Waterloo, dans l’ancienne auberge Bodenghien, qui servait aussi de relais de poste aux chevaux. C’est dans l’une des chambres, à l’étage, que sera signé le traité… Le bâtiment accueille aujourd’hui le tout nouveau Musée Wellington, qui pourrait tout aussi bien s’appeler Destins croisés. Les 14 salles y retracent l’historique de la bataille aussi bien du côté britannique que français à travers gravures, illustrations, armes, uniformes brodés, coiffes mais aussi souvenirs – foulard de soie, services à thé mettant en scène la vie de Napoléon…
Un détail hors du commun? Vous y verrez la prothèse de Lord Uxbridge. Drôle d’histoire! Ce brillant officier avait accompagné Wellington sur plusieurs campagnes avant de tomber en disgrâce… pour avoir enlevé l’épouse du frère de ce dernier. Il rejoint tout de même la bataille de Waterloo. Touché au genou par un éclat de canon, il se serait écrié “By God, sir, I’ve lost my leg!”, auquel Wellington aurait répliqué “By God, sir, so you have!”. Il sera amputé et enterrera sa jambe dans le jardin de l’auberge. Contre toute attente, cette petite tombe… attirera un nombre conséquent de touristes. Le fils d’Uxbridge découvrira que l’ossature n’est plus sous terre mais en exposition – on frôle l’incident diplomatique. L’aubergiste sera condamné à leur donner une sépulture décente. Petite supercherie, il assura l’avoir fait mais sa veuve les trouva bien plus tard cachés dans un tiroir. Elle les incinéra au plus vite.
>> Musée Wellington, Chaussée de Bruxelles 147, Waterloo
Direction la Ferme Mont Saint Jean, qui finit ses dernières rénovations. Le bâtiment, qui date du 13ième siècle, a vu passer bien des combats, En 1815, il gagne le surnom d’Hôpital anglais, Wellington ayant décidé d’y établir un centre de soin. Plus de 6 000 soldats y furent soignés.
Saviez-vous d’ailleurs que les troupes buvaient de la bière pendant les combats, la qualité de l’eau et des repas étant pauvre? Ce breuvage amenait substance… et courage simultanément. Les lieux abritaient déjà une brasserie il y a 200 ans. La voici relancée, plus moderne, pour produire la bière de Waterloo, une bière de terroir. Historique? D’une certaine façon. Il a fallu se documenter sur les recettes de l’époque, chercher quelles sortes de houblons, de levures étaient utilisées. 4 nectars sont à découvrir : la Triple Blonde, inspirée des coups de canon (une certaine douceur et l’amertume du houblon suivie de la belle intensité du malt), la Strong Dark (plus sur le grillé du café, ravigorante), la Cuvée Impériale (noble et élégante, généreuse) et la Waterloo Récolte (dorée comme le blé de la région, plus rafraichissante aussi). Pour le savourer, offrez-vous un calice de Waterloo, créée par l’un des maîtres potiers du pays. Chaque coupe demande 7 jours de travail. Un petite œuvre d’art – jetez un coup d’œil aux étapes de la fabrication par ici!
La ferme, remise en état, réserve bien des surprises et ouvrira pleinement pour le bicentenaire. On y trouvera un musée de la chirurgie, mettant aussi en avant le rôle des femmes durant les combats de l’époque… un autre dédié à Tintin… mais aussi une boutique mettant en avant les produits régionaux, un restaurant gourmet. A partir du 15 juin, des tours en carrioles et à vélo seront proposés à travers les champs.
>> Ferme Mont Saint Jean et brasserie Waterloo, Chaussée de Charleroi 591, Waterloo
Pour déjeuner, essayez donc, tout proche, le restaurant 1815. L’extérieur semble classique, mais le décor intérieur se révèle moderne et la cuisine très soignée. Vous êtes tout proche de la butte du lion…
>> Restaurant 1815, Route du Lion 367, Waterloo
Autre nouveauté pour juin 2015, la naissance du Mémorial 1815, un musée assez extraordinaire puisqu’il se situe… sous terre. L’idée? Ne pas dénaturer le paysage, le garder au plus près de ce qu’il devait être avant la bataille : des champs, à l’infini. Une fois la construction terminée, le toit se couvrira d’herbe, recueillant juste la lumière naturelle par un discret puits lumineux. Du haut de la butte, à ses côtés, on n’en devinera pas l’existence.
Le Mémorial 1815 s’inscrit dans ce que j’appelle les musées modernes. Interactif et décalé dans un premier temps, pour mieux aborder le background politique de l’époque (pions d’échec, petite vidéos dans des tambours, projection sur une guillotine, tableaux s’animant soudainement). Le parcours s’ouvre soudain un long couloir, reprenant l’idée des longues marches des troupes. A gauche, celles de Wellington. A droite, celle de Napoléon. On dépasse les gradés à chevaux, notant les détails des uniformes, les armes, épées, fusil… La pente monte doucement, on imagine la fatigue après des kilomètres, sans rien voir d’autres que ses camarades de fortune. Arrivés au bout de la ligne, on se retourne. Sur une baïonnette. Un soldat, suivi d’autres soldats. La gorge se serre.
Just’après, les visiteurs se glissent dans un cinéma multi-sensoriel – 3D et effets spéciaux. Vous allez “vivre” la bataille. Comprenez pas seulement en suivre le déroulement mais vous retrouver au milieu des combats, les soldats tombant à vos côtés, les chevaux filant droit sur vous, jusqu’à pouvoir en apercevoir la dentition. On ne se sent plus spectateur mais intervenant, légèrement désemparé de ne pouvoir aider ni agir. Les images finales défilent sur les milliers de morts. Un chiffre, sur un papier, c’est une chose. Abstraite, irréelle presque. Se retrouvé entouré de corps ainsi… être mis face à une certaine réalité. On en ressort bouleversé. Un véritable impact.
Un musée émotionnel, assurément.
>> Memorial 1815, Route du Lion, Braine-l’Alleud
Le Hameau du Lion se compose du Memorial 1815, du Panorama (une fresque de 110 mètres de circonférence et 12 mètres de haut qui vous plonge au cœur de la bataille, les sons ricochant autour de vous) et de la Butte du Lion. Son histoire? Rappelez-vous, cette partie du pays était à l’époque rattachée aux Pays-Bas. Le roi Guillaume 1er des Pays-Bas voulut marquer l’endroit présumé où son fils cadet, le prince Frédéric d’Orange-Nassau, fut blessé à l’épaule à la fin de la bataille. Un gigantesque lion veille à son sommet, soutenu par une immense colonne de brique. Sa gueule ouverte est tournée vers la France, vaincue… Il faudra gravir 226 marches pour profiter du panorama. Prenez quelques instants pour vous souvenirs qu’il y a 200 ans, gisaient là 48 000 victimes, dont 10 000 moururent sur le terrain…
Un immense merci à Visit Belgium pour 24 heures d’histoire époustouflantes